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Allemagne : large victoire du SPD aux élections régionales en Sarre

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Localisation du Land de Sarre au sein de la République fédérale d'Allemagne.

Publié le 28 mars 2022
Ce dimanche 27 mars s'est déroulé le premier volet des élections régionales allemandes, dans l’État-région de Sarre, dans le Sud-Ouest du pays. Le scrutin a déterminé la nouvelle composition du Parlement régional pour la 17e législature. À l'issue d'une campagne largement dominée par les thématiques économiques, le parti social-démocrate SPD du chancelier Olaf Scholz a enregistré une large victoire avec 43,5 % des voix, contre 28,5 % pour le parti conservateur CDU (Union chrétienne-démocrate). Selon les résultats préliminaires, les sociaux-démocrates obtiendraient 29 des 51 sièges du Parlement, contre seulement 19 sièges pour la CDU. Le parti d'extrême-droite Alternative pour l'Allemagne (AfD) comptabilise quant à lui 5,7 % des voix. En revanche, les écologistes de Die Grünen, les libéraux-démocrates du FDP et la gauche radicale de Die Linke ont échoué à dépasser le seuil de 5 % ; ils ne seront donc pas représentés au Parlement régional.

Composition du nouveau parlement

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Les résultats du scrutin avec le nombre de siège par parti au Parlement régional.

Reprise du pouvoir par le SPD, une « débâcle » pour la CDU et Die Linke

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La tête de liste SPD Anke Rehlinger lors de la soirée électorale du 27 mars à la Congresshalle de Sarrebruck.

Avec un score de 43,5 %, soit 14 points de plus qu'aux élections 2017, le SPD met fin à 23 ans de règne conservateur sur cette petite région frontalière de la France. Ce scrutin est donc un test réussi pour le Parti social-démocrate, 100 jour après l'accession d'Olaf Scholz au poste de chancelier fédéral. La tête de liste du SPD, Anke Rehlinger, succédera ainsi à Tobias Hans au poste de ministre-présidente de la Sarre. Elle était depuis janvier 2014 vice-ministre-présidente et ministre de l'Économie, de l'Emploi, de l'Énergie et des Transports. Le Parti social-démocrate est arrivé en tête dans l'intégralité des 52 communes du Land[1] et a obtenu la majorité des suffrages dans la plupart des classes sociales et des catégories d'âge, à l'exception des jeunes.[2] Le SPD a notamment retrouvé son électorat traditionnel : les ouvriers et les retraités,[3] avec un score de 49 % dans ces deux groupes.[2] Un point important en Sarre, où le revenu par habitant est le plus faible parmi les Länder de l'Ouest.

Dans le camp social-démocrate, on s'est largement félicité de cette victoire. La co-présidente du SPD à l'échelle fédérale, Saskia Esken, a affirmé que les résultats du scrutin sont « une victoire pour tout le parti »,[4] tandis que son homologue Lars Klingbeil a indiqué que cette large victoire s'inscrit dans la continuité du « retour en force du SPD que nous avons vécu aux élections fédérales ».

Le ministre-président sortant Tobias Hans, tête de liste de la CDU.

La CDU, en revanche, a connu une baisse de 12,2 points par rapport au scrutin régional de 2017 et s'est retrouvé à 28,5 %. Selon le politologue Thorsten Winkelmann de l'université d'Erlangen-Nuremberg, cette défaite marque avant tout un échec personnel pour Tobias Hans, qui aurait eu un programme trop faible et une personnalité peu convaincante durant la campagne ; or, dans ce petit État-région, les scrutins régionaux prennent souvent des allures d'élections municipales : « comme à Munich ou à Cologne, la personnalité des candidats joue un rôle beaucoup plus important que l'étiquette politique », d'après Winkelmann.[5] De son côté, le ministre-président sortant a parlé d'une « défaite très amère » et a déclaré vouloir tirer les « conséquences personnelles » de cet échec.[6] Il pourrait renoncer à son poste de député au Parlement régional, voire démissionner de son poste de président de la branche sarroise de la CDU. Le président du parti CDU au niveau fédéral, Friedrich Merz, a attribué l'échec électoral aux particularités locales et au paysage politique singulier de la Sarre.

En proie à des querelles internes avant le scrutin qui l'avaient poussé à retirer sa liste régionale dès la mi-janvier, l'Alternative pour l'Allemagne (AfD) conserve toute de même les trois sièges qu'elle avait obtenus en 2017. Le parti d'extrême-droite arrive en troisième position dans 40 des 52 communes de la région et réalise son meilleur score dans la municipalité de Weiskirchen (8,2 %).[7] Le score de l'AfD est deux fois plus élevé dans les classes moyennes et défavorisées que dans les classes supérieures. Ce qui a conduit le porte-parole de l'AfD, Tino Chrupalla, à affirmer que la montée de l'AfD n'est plus synonyme de fracture entre Est et Ouest.[8] À la surprise générale, le député Josef Dörr, jusqu'ici chef de file du groupe AfD au Parlement régional, est réélu ; il semble ainsi avoir profité du retrait de la liste de son parti pour ce scrutin.[9] À 83 ans, Dörr sera de nouveau le doyen de la législature. Néanmoins, cette année, il n'est pas certain que les trois députés du parti d'extrême-droite s'entendent pour former un groupe parlementaire.[10]

À l'instar de la CDU, la gauche radicale du parti Die Linke a elle aussi connu une défaite cinglante : avec 10,3 points de moins qu'au précédent scrutin, elle se voit contrainte de quitter le Parlement régional. Après cet échec, le chef de file du groupe Die Linke au Parlement fédéral allemand, Dietmar Bartsch, a appelé à redéfinir la ligne politique du parti. Le parti de gauche a lui aussi souffert d'importantes querelles internes, qui ont conduit au départ d'Oskar Lafontaine du parti, 10 jours avant le scrutin. En conséquence de cette lourde défaite, Thomas Lutze, le président du comité régional de Die Linke en Sarre, a annoncé ne pas se représenter à ce poste pour le congrès régional du parti en mai prochain.

Quant à eux, les Libéraux-démocrates manquent de peu d'accéder à la représentation régionale, avec un score de 4,8 %. Le FDP avait déjà échoué à passer le seuil des 5 % lors des deux précédents scrutins régionaux, en 2012 et 2017. Le président du parti, Christian Lindner, a affirmé que « les petits partis ont beaucoup souffert » de cette campagne marquée par l'opposition entre le ministre-président sortant et son adjointe.

Enfin, les Verts n'ont manqué que de 23 voix pour être représentés au Parlement[11] et doivent se contenter d'un score de 4,995 %.[12] Ils voient tout de même leur score augmenter de près d'1 % par rapport aux élections de 2017.

Notons que le scrutin a connu une participation plus faible qu'en 2017 (61,4 % contre 69,7 %), mais d'un niveau équivalent à celui de 2012 (61,6 %).

Anke Rehninger entend gouverner seule

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Alors que les résultats étaient encore incertains dimanche soir, la tête de liste SPD Anke Rehlinger a gardé ouverte la voie à la formation d'une « grande coalition » avec l'Union chrétienne-démocrate. Dans les faits, bien qu'une coalition avec la CDU soit possible, le SPD dispose d'une majorité absolue en nombre de sièges au nouveau Parlement régional. Les sociaux-démocrates n'ont donc pas besoin de l'aide de l'opposition pour former un gouvernement régional. Dans une interview accordée lundi matin à l'émission ARD-Morgenmagazin de la chaîne Das Erste, Rehninger a annoncé que son parti gouvernerait seul l'État-région de Sarre pour les cinq années à venir. Elle souhaite en effet voir « rapidement » un nouveau gouvernement à l'œuvre. Quoiqu'il en soit, les directives du prochain gouvernement seront débattues ce lundi soir lors d'une réunion du bureau politique régional du SPD.

La ministre-présidente élue a néanmoins déclaré qu'il est « dommage » que les Verts et les Libéraux-démocrates ne soient pas représentés au parlement. Elle entend toutefois collaborer de façon extra-parlementaire avec ces deux partis, au même titre qu'avec la CDU : « Dans un État fédéral, on gouverne ensemble. Il est donc important que nous collaborions aussi là, lorsqu'il s'agit de faire avancer l'économie de la Sarre. »

Le début d'une série de victoires pour le SPD ?

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Le SPD voit dans ces résultats un signe de renouveau pour les élections à venir : « Anke Rehlinger est la première depuis cinq ans à avoir réussi à faire basculer un Land. Ce nœud gordien est désormais tranché. On peut gagner des élections régionales en étant challenger », a déclaré le secrétaire général du parti, Kevin Kühnert.

Les deux prochains scrutins auront lieu le 8 mai en Schleswig-Holstein, puis le 15 mai en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, actuellement dominés par les conservateurs de la CDU. Pour l'heure, les sondages prévoient une victoire nette de la CDU en Schleswig-Holstein[13] et une légère avance de la CDU en Rhénanie-du-Nord-Westphalie.[14] La CDU reste confiante pour ces deux scrutins, où « les règles et les thèmes abordés sont différents » qu'en Sarre, selon Daniel Caspary, membre du bureau politique fédéral du parti.[15] Malgré la défaite en Sarre, le président de la CDU Friedrich Merz a déclaré vouloir regarder vers l'avant : « Nous ne commencerons pas l'année 2022 par une dépression. Bien au contraire : les résultats du scrutin d'hier nous remotivent. »

Dans tous les cas, le politologue Thorsten Winkelmann rappelle que les élections régionales dans le petit État-région de Sarre ne sauraient donner un juste aperçu des résultats à venir à l'échelle fédérale.[5]


Wikipédia propose une ou plusieurs pages encyclopédiques : Élections régionales de 2022 en Sarre sous licence Creative Commons
Wikimedia Commons propose des documents multimédia sur Élections régionales de 2022 en Sarre.
  1. Kommunenergebnisse: Das gesamte Saarland wählt rot, 27 mars 2022, Saarländischer Rundfunk. Consulté le 28 mars 2022
  2. 2,0 et 2,1 Johannes Christ, « Hans sieht rot: Nur eine Berufsgruppe hält der CDU die Treue », RedaktionsNetzwerk Deutschland. Mis en ligne le 28 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  3. Berit Kruse, Sören Müller-Hansen, « Landtagswahl im Saarland : Wie die SPD die Wahl gewonnen hat » sur Süddeutsche Zeitung. Mis en ligne le 28 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  4. SPD-Chefin Esken: Wahlsieg im Saarland ist Erfolg für gesamte Partei, Norddeutscher Rundfunk. Mis en ligne le mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  5. 5,0 et 5,1 Michael Kniess, « Wahl im Saarland - Warum war CDU-Chef Merz so passiv? », ZDF. Mis en ligne le 28 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  6. als/dpa/Reuters/AFP, « Tobias Hans kündigt »persönliche Konsequenzen« an » sur Der Spiegel. Mis en ligne le 27 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  7. AfD bleibt recht konstant, Saarländischer Rundfunk. Mis en ligne le 28 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  8. dpa, « Saarland-Pressekonferenz der AfD ohne Chef Chrupalla » sur Süddeutsche Zeitung. Mis en ligne le 28 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  9. Ulrich Brenner, « Das Debakel mit der AfD-Landesliste – Josef Dörr nur dank Aktion seiner Gegner im Landtag » sur Saarbrücker Zeitung. Mis en ligne le 28 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  10. Daniel Kirch, « AfD-Politiker Josef Dörr wird im neuen Landtag wieder Alterspräsident » sur Saarbrücker Zeitung. Mis en ligne le 28 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  11. Grüne verfehlen Landtag um wenige Stimmen, Saarländischer Rundfunk. Mis en ligne le 27 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  12. Saar-Wahl: SPD holt absolute Mehrheit, Grüne mit 4,995% raus sur Süddeutsche Zeitung. Mis en ligne le 28 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
  13. Umfragen Schleswig-Holstein (#ltwsh) sur wahlrecht.de. Consulté le 28 mars 2022
  14. Umfragen Nordrhein-Westfalen (#ltwnrw) sur wahlrecht.de. Consulté le 28 mars 2022
  15. RND/dpa, « CDU-Präsidiumsmitglied Caspary sieht große Chancen für Wahlsieg in NRW und Schleswig-Holstein » sur RedaktionsNetzwerk Deutschland. Mis en ligne le 28 mars 2022, consulté le 28 mars 2022
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