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Sierra Leone : Charles Taylor refuse de comparaître à la première audience de son procès à La Haye

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Publié le 5 juin 2007
Le procès de l'ancien président du Libéria, Charles Taylor, poursuivi pour 11 chefs d'inculpation dont des crimes contre l'humanité et crimes de guerre, s'est ouvert lundi 4 juin 2007 à La Haye, aux Pays-Bas, devant le Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL), en l'absence de l'accusé, qui estime son procès « inéquitable » et conteste les moyens qui lui sont alloués pour assurer sa défense.

L'unique avocat du prévenu, Me Karim Khan, a lui-même quitté la salle d'audience après quelques échanges avec la présidente du tribunal, la juge Julia Sebutinde.

La guerre civile 1991-2002

Localisation de la Sierra Leone
Carte de la Sierra Leone

La guerre civile de Sierra Leone a été déclenchée le 23 mars 1991, par le Revolutionary United Front (RUF), groupe armé fondé par Foday Sankoh, réputé proche de Charles Taylor, les deux hommes s'étant liés lors d'un séjour, dans les années 1980, dans un camp d'entraînement en Libye, sous la protection du colonel Kadhafi. Foday Sankoh avait fondé son mouvement sierraléonais en 1988, tandis que Charles Taylor, en rébellion contre le président Samuel Doe, avait intégré une formation libérienne existante, le National Patriotic Front of Liberia, et en avait pris la tête en 1989.

La guerre civile en Sierra Leone

De son côté, Foday Sankoh et le RUF avaient attendu le 23 mars 1991 pour lancer leur propre campagne militaire au Sierra Leone.

Les 11 années qui avaient suivi avaient entraîné, en Sierra Leone, au cours d'une guerre qui avait pour but principal le contrôle des zones diamantifères de Sierra Leone et du trafic international des diamants via le Libéria, de nombreuses pertes civiles. On a estimé le nombre de morts entre 100 000 et 200 000 tandis que, sur moins de 5,5 milliosn d'habitants, plus de deux millions sont, à un moment ou à un autre, devenus des réfugiés en raison de la guerre civile. Les rapports des associations humanitaires ont également fait état, durant cette période, de nombreuses exactions, incluant des viols et de très nombreuses mutiliations corporelles infligées à des civils, tandis que la rébellion enrôlait de force des enfants, parfois très jeunes, dans ses rangs.

À la fin de l'année 1996, après la conclusion, le 30 novembre, des accords d'Abidjan entre Foday Sankoh et le nouveau président sierraléonais Ahmad Tejan Kabbah, on avait brièvement pensé à un retour de la paix, mais la guerre civile était repartie de plus belle après l'arrestation de M. Sankoh, au Nigeria, en mars 1997, pour détention d'armes à feu. La guerre avait ensuite connu divers rebondissements, dont une mise à sac par les troupes du RUF de la capitale sierraléonaise, Freetown, en janvier 1999, ainsi qu'un coup d'État qui avait porté un temps au pouvoir un mouvement allué de Foday Sankoh et du RUF.

Les deux guerres civiles au Libéria

Charles Taylor et le NPFL avaient entamé les hostilités contre le président Samuel Doe, au Libéria, le 24 décembre 1989.

Pendant ce temps-là, au Libéria voisin, la progression de Charles Taylor et du NPFL avait été régulière. La guerre civile au Libéria s'était achevée après la conclusion des accords d'Abuja en août 1996. Le NPFL s'était mué en une formation politique légale, le National Patriotic Party, qui avait remporté une large victoire aux premières élections postérieures à la guerre civile, le 19 juillet 1997. Charles Taylor l'avait emporté dès le premier tour de l'élection présidentielle, avec 75,33 % des suffrages exprimés, tandis que, sur la base de son score, le NPP se voyait attribuer, à la représentation proportionnelle, 49 des 64 sièges de la Chambre des représentants et 21 des 26 sièges du Sénat. Charles Taylor avait pris ses fonctions le 2 août 1997.

Une seconde guerre civile avait éclaté au Libéria en 1999 lorsqu'un groupe rebelle soutenu par la Guinée voisine, les Liberians United for Reconciliation and Democracy (LURD), s'étaient lancés dans la lutte armée pour tenter de chasser Charles Taylor du pouvoir. À partir du début de l'année 2003, un second groupe armé, le Movement for Democracy in Liberia, réputé soutenu par la Côte d'Ivoire, s'était à son tour lancé dans la bataille ce qui avait conduit, à la fin du mois de juillet, à l'encerclement de la capitale libérienne, Monrovia, puis à la démission de Charles Taylor, le 11 août, suivie de sa fuite au Nigeria.

Chronologie judiciaire 2000-2007

Le 14 août 2000, le Conseil de sécurité de l'ONU votait la résolution 1315, qui donnait mandat à Kofi Annan, secrétaire général, de négocier avec les autorités de Sierra Leone pour créer un tribunal de juridiction mixte, appelé à juger les « principaux responsables de crimes contre l'humanité, crimes de guerre et de certains crimes prévus par le droit sierra léonais commis depuis le 30 novembre 1996 », date des accords d’Abidjan (Côte d'Ivoire), par lesquels divers protagonistes régionaux avaient en vain tenté de mettre fin à la guerre civile sévissant en Sierre Leone.

Le principe de la création du Tribunal spécial pour la Sierra Leone (TSSL) avait été formellement conclu le 16 janvier 2002, par un accord entre l'ONU et la Sierra Leone, le parlement de ce pays votant en mars 2002 une loi pour ratifier l'accord, entré formellement en vigueur en juillet, tandis que les juges siégeant au TSSL prêtaient serment en décembre de la même année, ouvrant la voie au travail d'instruction.

La présidente nouvellement élue du Libéria, Ellen Johnson Sirleaf, avait formellement transmis aux autorités du Nigeria, le 17 mars, une requête d'extradition visant Charles Taylor, réfugié dans ce pays depuis son départ du pouvoir en août 2003. Le gouvernement du président nigérian, Olusegun Obasanjo, faisait savoir, le 25 mars, qu'il n'accorderait pas l'asile politique à l'ancien président libérien. Le 28 mars, les autorités policières nigérianes constataient la disparition de M. Taylor de son domicile, mais annonçaient le lendemain son arrestation dans le nord-est du pays, alors qu'il s'apprêtait à franchir la frontière menant au Cameroun.

Charles Taylor avait alors été transféré à Monrovia, au Libéria, puis aussitôt remis à la justice de la Sierra Leone. Il avait comparu une première fois devant le TSSL, le 3 avril 2006 à Freetown, pour une audience préliminaire [1] destinée à lui notifier les charges qui pesaient à son encontre.

Parallèlement, le président du TSSL avait demandé aux Pays-Bas, le 29 mars, d'accepter l'hébergement du procès de Charles Taylor par la Cour pénale internationale, à La Haye, invoquant des risques que la tenue du procès ferait courir à la stabilité de la région. Le 13 avril, le TSSL et la CPI signaient un « mémorandum d'accord » pour définir les premières modalités de ce transfert à La Haye. Ce principe d'une « délocalisation » du procès avait ensuite été approuvé par la résolution 1688 du Conseil de sécurité de l'ONU, le 16 juin 2006, le Conseil ayant à cette occasion demandé que le TSSL, avec l'assistance du secrétaire général de l'ONU et des autorités des États concernés, fassent en sorte « que les populations de la sous-région puissent suivre le déroulement du procès, notamment par liaison vidéo ».

Les charges

Charles Taylor se voit reprocher 11 chefs d'inculpation, répartis en sept chapitres :

  • Terreur contre des population civiles et punitions collectives
    1. actes de terrorisme (crimes de guerre) ;
  • mises à mort illégales
    1. meurtres (crime contre l'humanité) ;
    2. violences contre la vie, la santé ou le bien-être physique ou mental des personnes, en particulier traitement cruel (crime contre l'humanité) ;
  • violences sexuelles
    1. viols (crime contre l'humanité) ;
    2. esclavage sexuel et toute autre forme de violence sexuelle (crime contre l'humanité),
    3. atteintes à la dignité des personnes crime de guerre) ;
  • violences physiques
    1. violences contre la vie, la santé ou le bien-être physique ou mental des personnes, en particulier traitement cruel (crime de guerre) ;
    2. autres actes inhumains (crime contre l'humanité) ;
  • utilisation d'enfants soldats
    1. conscription ou enrôlement d'enfants âgés de moins de 15 ans dans des forces armées ou des groupes, ou utilisation de ceux-cieux pour participer activement aux hostilités (autre violation sérieuse des lois humanitaires internationales) ;
  • enlèvements et travaux forcés
    1. esclavage (crime contre l'humanité) ;
  • pillage
    1. pillage (crimes de guerre) :
Notes

Sources

Sources anglophones
Sources francophones