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Droit en France : les visites à domicile de la CNIL sous le contrôle du juge judiciaire

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Publié le 12 novembre 2009
Le Conseil d'État a annulé, le vendredi 6 novembre 2009, une amende infligée par la CNIL à une société commerciale. La commission reprochait à la société Pro Décor des manquements concernant le démarchages téléphonique. Plusieurs clients ont adressé, sans succès, une demande tendant à l'effacement de leurs coordonnées téléphoniques à fin de prospection commerciale. Saisie de l'affaire, la CNIL a procédé à une visite à domicile pour constater les infractions. La CNIL a adressé, ensuite, une mise en demeure à l'encontre de la société. La CNIL lui demandait de « cesser d'utiliser une base de données non mise à jour et de prendre toutes mesures de nature à garantir qu'il soit systématiquement et immédiatement tenu compte du droit d'opposition exercé par toute personne concernée à recevoir de la prospection commerciale, (…) et de mettre en œuvre des mesures de nature à conserver la trace de ces demandes, dans un délai de 15 jours ».

L'article 8 de la CESDH

1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance.

2. Il ne peut y avoir ingérence d’une autorité publique dans l’exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu’elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l’ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d’autrui.

Une mise en demeure restée sans effet

Après une seconde visite dans les locaux de la société, la CNIL a constaté une nouvelle fois que la procédure de radiation «  ne garantissait pas la prise en compte effective et rapide de l'ensemble des demandes d'opposition et ne répondait donc pas à la mise en demeure ». Une amende de 30 000 € a été infligée à la société. Une injonction tendant à « cesser d'utiliser le traitement de prospection commerciale tant qu'une nouvelle procédure efficace des demandes de radiation n'aurait pas été mise en place et notifiée à la commission », a été adressée à la société.

Pro Décor saisit le Conseil d'État

Mécontente de cette décision, la société Pro Décor a saisi le Conseil d'État invoquant la nullité de la procédure au regard de la CESDH[1]. Et elle obtient gain de cause.

La Section du contentieux relève que la loi Informatique et Liberté permet que les membres de la CNIL «  peuvent accéder à des locaux professionnels en dehors de leurs heures normales de fonctionnement et en l'absence du responsable du traitement ». À l'exception du droit d'opposition prévu par les textes, toute entrave à cette visite est sanctionnée pénalement. En revanche, aucun texte « ne prévoit que le responsable du traitement soit prévenu de cette visite et puisse se faire assister de la personne de son choix ».

Un vide juridique à combler

Devant le vide juridique, le Conseil a précisé la notion de respect au droit du domicile prévu par l'article 8 de la CESDH. « Si le droit au respect du domicile que ces stipulations protègent s'applique également, dans certaines circonstances, aux locaux professionnels où des personnes morales exercent leurs activités, il doit être concilié avec les finalités légitimes du contrôle, par les autorités publiques, du respect des règles qui s'imposent à ces personnes morales dans l'exercice de leurs activités professionnelles ». Et d'ajouter : « le caractère proportionné de l'ingérence que constitue la mise en œuvre, par une autorité publique, de ses pouvoirs de visite et de contrôle des locaux professionnels résulte de l'existence de garanties effectives et appropriées, compte tenu, pour chaque procédure, de l'ampleur et de la finalité de ces pouvoirs »

« En raison tant de l'ampleur de ces pouvoirs de visite des locaux professionnels et d'accès aux documents de toute nature qui s'y trouvent que de l'imprécision des dispositions qui les encadrent, cette ingérence ne pourrait être regardée comme proportionnée aux buts en vue desquelles elle a été exercée qu'à la condition d'être préalablement autorisée par un juge », note le Conseil. « Toutefois, la faculté du responsable des locaux de s'opposer à la visite, laquelle ne peut alors avoir lieu qu'avec l'autorisation et sous le contrôle du juge judiciaire, offre une garantie équivalente à l'autorisation préalable du juge », précisent les juges.

Droit à l'information imposé dans le silence des textes

En revanche, le Conseil estime, dans le silence des textes, qu'une « telle garantie ne présente néanmoins un caractère effectif que si le responsable des locaux ou le représentant qu'il a désigné à cette fin a été préalablement informé de son droit de s'opposer à la visite et mis à même de l'exercer ».

Ayant relevé que la société n'était pas informée de son droit de s'opposer à ces visites, la visite à domicile s'est déroulée selon une procédure irrégulière. La seule mention que « le contrôle était effectué en application de l'article 44 de la loi du 6 janvier 1978 modifiée ne saurait tenir lieu de l'information requise », énonce la Haute-Juridiction.

Notes

Voir aussi

Sources


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