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Droit en France : l'État tenu responsable pour le délais excessif dans l'exécution d'une décision de justice

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Publié le 28 mai 2010
Le Conseil d'État a établi la responsabilité de l'État dans l'exécution d'une décision de justice. L'affaire tire son origine par l'annulation, le 23 novembre 1994, par le Tribunal administratif de Rennes, de trois décisions du maire de Brest le radiant des cadres du personnel de sa commune.

Réintégré dans les service du maire, l'intéressé n'a pas été affecté à un poste. Ce dernier se tourne une deuxième fois devant la justice administrative pour obtenir l'exécution du jugement en sa faveur. Celle-ci annule une nouvelle fois, le 1er avril 1998, le refus implicite résultant du silence gardé par le premier magistrat de la ville. Une injonction a été prononcée pour l'exécution du jugement dans un délai de quatre mois. Là, l'injonction reste lettre morte. Une troisième saisie du juge est alors initiée pour le prononcé d'une astreinte journalière pour contraindre la ville de Brest à déférer au jugement. Le 15 avril 2002, soit plus de trois ans après, le président du T.A. de Rennes rend une ordonnance ouvrant la procédure juridictionnelle. Le 5 juin 2002, le tribunal prononce une nouvelle injonction, portant le délai à un an, mais rejette la demande d'astreinte du requérant. Cette décision ne satisfait pas le justiciable, qui interjette appel. Celui-ci finit en non-lieu à statuer, le 21 novembre 2003, la décision a été exécutée le 1er avril 2003, selon la cour administrative d'appel de Nantes. Il se pourvoit en cassation dont il se désistera finalement à la suite d'une tractation fructueuse avec la ville de Brest en 2005.

C'est alors sur le terrain de la responsabilité de l'État que le fonctionnaire territorial se tourne, plus précisément sur celui du délai de jugement excessif. Il adresse une demande d'indemnité au Garde des Sceaux[1], qui lui oppose une fin de non-recevoir. Saisi du dossier, le Conseil d'État lui donne satisfaction.

Dans un long considérant de principe, la Haute juridiction précise les contours de l'obligation pour les juridictions administratives de juger les requêtes dans un délai raisonnable.

Ainsi, la section du contentieux estime qu'il « résulte des principes généraux qui gouvernent le fonctionnement des juridictions administratives que les justiciables ont droit à ce que leurs requêtes soient jugées dans un délai raisonnable […] si la méconnaissance de cette obligation est sans incidence sur la validité de la décision juridictionnelle prise à l'issue de la procédure, les justiciables doivent néanmoins pouvoir en faire assurer le respect […] il en résulte que, lorsque leur droit à un délai raisonnable de jugement a été méconnu, ils peuvent obtenir la réparation de l'ensemble des préjudices tant matériels que moraux, directs et certains, causés par ce fonctionnement défectueux du service de la justice et se rapportant à la période excédant le délai raisonnable […] le caractère raisonnable du délai doit, pour une affaire, s'apprécier de manière globale — compte tenu notamment de l'exercice des voies de recours — et concrète en prenant en compte sa complexité, les conditions de déroulement de la procédure, de même que le comportement des parties tout au long de celle-ci, et aussi, dans la mesure où le juge a connaissance de tels éléments, l'intérêt qu'il peut y avoir pour l'une ou l'autre, compte tenu de sa situation particulière, des situations propres au litige et, le cas échéant, de sa nature même, à ce qu'il soit tranché rapidement […] lorsque la durée globale de jugement n'a pas dépassé le délai raisonnable, la responsabilité de l'État est néanmoins susceptible d'être engagée si la durée de l'une des instances a, par elle-même, revêtu une durée excessive ».

« La durée globale de jugement, en vertu des principes rappelés ci-dessus, est à prendre en compte jusqu'à l'exécution complète de ce jugement », ajoute la formation contentieuse.

Après avoir relevé que le jugement du 23 novembre 1994 du T.A. de Rennes aurait dû être exécuté complètement avant le 23 mai 1995, « cette exécution complète n'a été obtenue que par le protocole du 11 février 2005 signé entre M. A et la commune de Brest », note le Conseil. Et d'en déduire : « Si l'affaire qui a donné lieu au jugement du 23 novembre 1994 a été jugée dans un délai raisonnable, la période du 23 mai 1995 au 11 février 2005 excède le délai raisonnable d'exécution d'une décision de justice ».

Ce délai excessif a occasionné « un préjudice moral constituant en des désagréments qui vont au-delà des préoccupations habituellement causées par un procès », ajoute le Conseil. L'État a donc été condamné à verser la somme de 12 000 € à ce titre.

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